2021 n'a pas été un aussi bon cru pour la cuisine professionnelle que pour le froid. Comment expliquez-vous ce résultat ?
C'est essentiellement dû aux décalages des chantiers qui n'ont pas été facturés en 2 021. Certains dossiers se sont même retrouvés en litige en raison des hausses des matières premières et des composants. De nombreux donneurs d'ordre n'ont pas accepté les augmentations, se retranchant derrière les clauses d'un contrat « Prix fermes et non révisables ». Cela a donné lieu à des bras de fer qui parfois se sont mal terminés. D'où la création par notre syndicat d'une clause d'actualisation qui peut être désormais intégrée dans les contrats pour ne pas reproduire une situation qui peut mettre notre profession en péril. Aujourd'hui le marché revient à la normale mais on peut noter que la baisse des prix des métaux n'est pas encore répercutée sous prétexte que le coût de l'énergie flambe. Notre branche doit donc être très vigilante lorsqu'elle émet ses devis.
En quoi consiste cette clause d'actualisation ?
La Commission Cuisine du Snefcca a validé la mise en place d'une formule de révision des prix incluant un indice matière qui permet de corréler davantage le marché à l'évolution du prix des équipements. La formule proposée par la Commission prend toujours en compte la variation du coût salarial mais innove en pondérant le coût matériel avec un indice relié aux prix de production dans l'industrie.
La pénurie de techniciens vous pénalise-t-elle ?
Énormément. Certaines entreprises de maintenance ne peuvent même plus honorer les contrats qu'elles ont en portefeuille, faute de techniciens pour réaliser cette maintenance préventive pourtant essen - tielle. D'où notre mobilisation pour valoriser nos professions avec des campagnes impactantes avec des vidéos comme celle qui s'intitule « Pas de bonne cuisine sans bons experts en cuisine professionnelle». Elle sera diffusée à l'occasion de journées portes ouvertes dans les écoles, sur des forums de métiers, sur les réseaux sociaux ...
Notre métier est très riche mais c'est un métier qui est caché. Il faut dire et répéter qu'un chef ne peut pas faire de bonne cuisine si son matériel ne fonctionne pas correctement. Derrière lui il y a une équipe d'experts aux multiples compétences car le matériel est souvent très sophistiqué et nécessite des techniciens polyvalent, aguerris aux technologies de pointe. En outre, ce sont des métiers bien payés dont les salaires ont été revalorisés et en CDI à 91,5%. Certes, il y a quelques contraintes, des astreintes qui sont très bien rémunérées et il faut avoir un peu de passion pour ne pas hésiter à aller dépanner un restaurateur qui a une urgence ...
Que faudrait-il faire pour convaincre plus de jeunes de rejoindre votre filière ?
Les émissions de télé culinaire ont contribué à mettre la restauration sous les projecteurs et cela a été bénéfique au secteur. Mais il faut encore faire preuve de pédagogie pour convaincre que ceux qui œuvrent dans l'ombre, en coulisse, sont des acteurs clef. Le hub de l' alternance de l'OPCO des Entreprises de Proximité (OPCO EP) est un pre-entreprises et organismes de formation peuvent rentrer en contact. Je pense qu'à terme il faudrait aller jusqu'à la création de diplômes spécifiques à nos métiers.
Pourquoi le froid s'en sort-il mieux que la cuisine professionnelle ?
Le froid a plus de valeur ajoutée par rapport à une installation de cuisine professionnelle même si celle-ci devient de plus en plus technologique. Aujourd'hui, une installation de froid est plus complexe et requiert plus de technicité. Il reste encore beaucoup à faire pour convaincre les restaurateurs d' opter pour des équipements de cuisine de pointe, peut-être un peu plus cher mais moins énergivores et plus performants.
*Etude Xerfi Specific - année 2021