Dans un récent communiqué de presse, L’UFC-Que Choisir alerte à nouveau sur la réduction des effectifs des services officiels de contrôle sanitaire et sur ses conséquences pour les consommateurs.
A l’occasion de la publication du rapport1 du Bureau Européen des Unions de consommateurs (BEUC) sur l’insuffisance des contrôles alimentaires en Europe et alors que le projet de loi de finances est en cours de discussion, l’UFC-Que Choisir alerte une nouvelle fois sur la réduction considérable des effectifs des services officiels observée ces dernières années et les risques qu’elle comporte pour les consommateurs. Refusant la poursuite de l’hémorragie au sein de la DGCCRF et de la DGAL2, l’Association presse les pouvoirs publics de renforcer sans délai les moyens humains et réglementaires des organismes de contrôle, afin de garantir la sécurité des aliments. Alors que les scandales sanitaires se succèdent désormais à un rythme effréné (lasagnes à la viande de cheval en 2013, décès dus à la salmonelle dans des fromages au lait cru en 2015 et en 2016, œufs contaminés au Fipronil en 2017, affaire Lactalis en 2017 et 2018, puis viande de bœuf avariée de Pologne en 2019), les consommateurs peuvent de moins en moins compter sur la vigilance des autorités. C’est le constat que dresse le BEUC, sur la base d’une étude réalisée dans 12 pays de l’Union, qui montre que la réduction drastique des effectifs des services de contrôle observée dans un grand nombre d’États membres, ainsi qu’une réglementation trop laxiste sur certains points, fragilisent le dispositif censé garantir la sécurité des aliments. Une baisse de près d’un quart des contrôles sanitaires dans l’alimentation Comme la majorité des États européens, la France a fortement diminué les effectifs des services de contrôle dans l’objectif de réduire la dépense publique. Ainsi, les politiques d’économies menées dans le cadre de la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) en 2007 et de la Modernisation de l'action publique (MAP) en 2012, ont eu pour effet de faire baisser de 11 % le nombre de contrôleurs dépendant du Ministère de l’Agriculture3 et de 20 % ceux de la répression des fraudes entre 2005 et 2012. Ni les semonces répétées de la Cour des comptes4, ni la succession des scandales alimentaires n’ont inversé la tendance, et ces services subissent aujourd’hui un sous-effectif chronique, qui les empêche de mener à bien leurs missions. Le nombre de contrôles réalisés chez les professionnels de l’alimentaire a baissé de 24 % entre 2011 et 2016, à telle enseigne que les restaurants ne sont plus contrôlés que tous les quinze ans en moyenne. Alors que l’organisation sanitaire de la France constituait autrefois un modèle, celle-ci fait maintenant partie des lanternes rouges. Le dernier rapport de l’agence européenne de sécurité des aliments sur la présence de pesticides dans les aliments5 montre par exemple que sur les 30 pays analysés (UE + Norvège et Islande) la France arrive en 25e position sur le nombre de contrôles réalisés rapportés à la population. Les règles d’hygiène de moins en moins respectées par les professionnels On observe parallèlement, une dégradation de l’hygiène chez les professionnels dans tous les secteurs : entre 2013 et 2017 le taux d’anomalies relevé en France lors des contrôles est passé de 42 % à 49 %. Des entorses aux règles d’hygiène sont ainsi constatée dans 28 % des abattoirs et des ateliers de découpe, dans 38 % de cantines et même dans 57 % des petits commerces alimentaires (restaurants, pâtisseries, traiteurs…). Il est vrai que les suites données aux non-conformités sont peu fréquentes et insuffisamment dissuasives. Ainsi, en 2008, 5 ans avant le scandale de la viande de cheval, une inspection réalisée dans les établissements Spanghero qui faisait pourtant état de non-conformités majeures telles que l’absence de dates limites, n’avait alors entraîné qu’un simple avertissement ! La libre circulation bien mal contrôlée des aliments à travers l’Europe Une conséquence trop peu connue du principe de libre circulation des marchandises en Europe est qu’il limite fortement la capacité des États-membres à contrôler les aliments provenant d’autres pays de l’Union lors de leur arrivée sur le territoire national. Pourtant, les quelques cas où les autorités sont autorisées à réaliser ces contrôles révèlent que les règles d’hygiène sont tout aussi mal respectées dans les autres pays de l’Union. Les services français ont ainsi relevé pour la période 2010-2011, 17 % d’infractions dans les lots de viandes fraîches, 21 % dans les produits laitiers et 25 % dans les produits transformés à base de viande. Au vu des dangers que fait courir aux consommateurs l’affaiblissement délibéré des politiques sanitaires françaises et européennes, l’UFC-Que Choisir demande : Au Gouvernement français :- Un financement du renforcement des effectifs des services officiels dans le cadre du projet de loi de finances et un recentrage de leurs missions prioritaires pour que ceux-ci soient en mesure d’assurer pleinement leurs fonctions de contrôle ;
- La mise en place de sanctions réellement dissuasives pour les professionnels enfreignant les règles d’hygiène ;
- Un affichage obligatoire des résultats des contrôles sanitaires à l’entrée des commerces alimentaires ;
- Le changement de pratique des services de contrôle dans la rédaction de leurs rapports afin que les entreprises en infraction y soient clairement désignées ;
- La réalisation d’évaluations régulières publiques des États-membres sur leurs obligations en matière sanitaire et l’application de sanctions en cas de manquements à ces obligations ;
- La création d’une police sanitaire européenne habilitée à réaliser des contrôles sur tout le territoire de l’Union.